Transmission de valeurs chez les Massa du Cameroun: passage de l’enfance à l’âge adulte!

22 septembre 2014

Transmission de valeurs chez les Massa du Cameroun: passage de l’enfance à l’âge adulte!

A chaque modèle de société ou de culture ethnique correspond un type d’homme et de femme précis en fonction du ciment d’éducation choisi ; et ce ciment, ce sont les valeurs culturelles. Selon les propos de Freinet (1969), la jeunesse est l’âge privilégié où tout semble possible. On se fait confiance d’instinct ; sans preuves nécessaires ; simplement parce que l’on se sent fort. Inutile donc de donner des recettes à ceux qui prennent la route; ni de modèles à suivre, ces modèles seraient-ils les meilleurs dans leur forme et dans leur contenu. La jeunesse est sans égard pour les choses parfaites, car les choses irréprochables ne savent plus s’adapter aux conditions changeantes de la vie : elles sont bonnes seulement pour le musée. Inspirée par ces propos de Freinet, j’ai porté mon regard sur la communauté de pratique des Massa, groupe ethnique du Mayo-Danay et groupement sociologique soudano-sahélien de la région de l’extrême-nord du Cameroun. La communauté d’appartenance, c’ est la communauté à laquelle on appartient au sens ethnique, culturel ou religieux. Par exemple, on peut parler de communauté moundang, massa, toupouri, bamiléké, bulu ewondo etc. C’est en ces termes que je me propose de m’entretenir avec vous sur la manière dont les ancêtres Massa, peuple du Mayo-Danay, aidaient les jeunes et les accompagnaient dans leurs futurs rôles d’adulte.

Ceci me permet d’aborder la question de l’éducation enracinée et socioculturelle avec des référentiels qui soient des tremplins de constructions idéelles et techniques, en la matière plus poussées. Les massa sont un peuple vivant au Tchad et au Cameroun, bref il est un peu difficile de bien circonscrire les origines de ce peuple. Le mot massa tire son origine de massana qui signifie littéralement l’homme par excellence. En d’autres termes, le massa renvoie à l’homme courageux, qui franchit les obstacles sans heurt majeur et ceci quelque soit les obstacles à braver. A mon sens et d’après mes lectures, former l’homme à être adulte et responsable pour son bien-être consiste à le guider dans son processus d’intégration au sein de sa société d’appartenance, bref durant toute sa vie. Ainsi, les valeurs primordiales recherchées sont le courage, l’endurance, l’intelligence (ruse), la force physique, le travail et la persévérance, la fidélité, la créativité et la vertu. Il s’agit pour l’ancêtre de la tribu d’apprendre à l’enfant de tenir bon dans la souffrance, de la supporter et surtout de mépriser son corps, de se sacrifier pour le bonheur. L’homme massa traduit cette situation par les adages suivants : lasta nii samgoudjouna, lasta mai tchi sadi. Ceci revient à dire que c’est dans la souffrance qu’on adopte et réalise les bonnes initiatives.
La société massa est organisée de manière hiérarchisée. Chez le peuple Massa, certains chefs traditionnels portaient le nom de ‘’chefs de terre’’ ou chefs coutumiers. Les Massa leur donnent le nom de ‘’Boum nagada’’, Dans cette société, ce sont le ‘’Boum nagada’’ qui détiennent la quasi-totalité des pouvoirs magico-religieux. En plus de leurs rôles d’annonciateurs de semences et de récoltes, ces gardiens de la tradition massa était également chargés de régler les conflits fonciers entre les différents membres de leurs communautés respectives.
Dans un cas comme dans l’autre, les populations se devaient de respecter les ordres de ces chefs de terre. Par la suite, nous avons le lawna qui est le dieu suprême dans la société massa. C’est lui qui représente toutes les bonnes et les mauvaises choses, c’est à lui qu’on voue des cultes. Un peu plus loin, nous avons mounounda qui est la déesse des eaux et incarne aussi la fertilité car ; d’elle dépend les bonnes et les mauvaises récoltes ainsi que l’abondance du poisson.
Chez le peuple massa, l’accent est mis sur l’éducation de l’homme et par conséquent celui de la femme, avec quelques spécificités. Les ancêtres transmettent le savoir oralement et orientent les jeunes vers leurs futures taches d’adulte par des proverbes. Par exemple, pour enseigner à un jeune comment être prudent, ils lui disent : vounan diidi hla fandi, traduit littéralement par  »rien ne te serait arrivé si tu avais su tenir ta langue » ; ou encore cet autre djiklodi nig’gadi qui veut dire littéralement,  »si tu n’étais pas monté, tu ne serais pas tombé ».
Le constat que je peux relever  est que la relation qui existe entre les vieux et les jeunes est une relation d’éducateur et d’éduqué. En effet, le système éducatif dans la société traditionnelle massa vise deux objectifs essentiels : former l’homme et la femme à être adultes et pour leur intégration au sein de la société.
Ces considérations sont tout à la fois le fruit d’expérience, de l’environnement social et du bon sens.  Le mieux que je puisse dire, c’est qu’une tradition, c’est à la fois ce dont on se souvient et ce avec quoi on s’identifie. Le fondement de toute tradition est une communauté, un être collectif au sens durkheimien du terme. Une telle communauté peut prendre la forme d’un véritable réseau intergénérationnel de transmission, ou être purement imaginaire, comme les pseudo-lignages dont Weber avait remarqué l’existence au sein de certaines coalitions tribales qui s’étaient inventé des ancêtres pour les besoins de leur propre organisation politique.

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Commentaires

Djarsoumna Alain
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Je suis ravi du fait que la culture massa ne soit plus possedée uniquement par les anciens. Nous qui avons grandi loin de Yagoua et ses environ pourrons connaitre notre via le net. merci!

lopsiwam
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Ah oui! Il faut certes être branché sur l'actualité mais en étant au parfum de sa culture. Bref être enraciné dans sa culture et ouvert au monde...

Douroum
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Très intéressant !

Garanss
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Cous suis vraiment épaté, bravo!

simanga
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Je suis vraiment. Content du fait que certaines gens s'intéressent à la culture massa du courage.

Vayboya Antoine
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Je suis ravi de rencontrer ce site

Ahmadou wouna
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Très intéressént Mairi!

Ahmadou wouna
Répondre

Très intéressent Mairi!

lopsiwam
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Mercibcouz! C'est gentil!

blandine
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Je ne suis pas massa mais du sud.je passe bcp de temps avec les massa.et je suis marqué par la solidarité et le respect qu ils se portent .

RAMLINA patrice
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Merci d'avoir rappelé les fondamentaux de la culture massa. Aussi est-il unanimement reconnu qu'on ne naît pas Massa mais on le devient.